Marseille, ville rebelle - Reportage de Martin Weill

Photo Lionel Duval @lionel_duval

Marseille, ville rebelle.
Un reportage de Martin Weill

Marseille a toujours été rebelle rien de nouveau.

Je décide néanmoins de regarder le reportage diffusé sur TMC TV. Dès le départ je pense être partie pour une déception. Trop de clichés au démarrage. Le soleil, les calanques, la pétanque etc…

Les non-initiés découvrent quelques éléments de langage. Chaler, bouléguer. C'est parti pour la balade incontournable dans le quartier du Panier.

Les marseillais, quand on leur donne la parole ils ne demandent pas mieux que de raconter leur ville. Marseille a toujours eu la tchatche.

Le reportage embraye sur l'abandon des quartiers nord depuis des années. Un abandon qui a fait naître un terreau fertile pour les trafics et l'insécurité.

La fracture est brutale avec les quartiers sud, les quartiers riches. Ces quartiers qui font rêver ceux qui n'ont pas la chance d'y vivre. Les élèves sortent de leur prestigieuse école, montent dans leur voiture sans permis et écoutent Jul en roulant. Même ville mais carrément pas la même planète.

La fracture nord sud est là et bien là, comme si on changeait de galaxie. Le week-end dans les quartiers nord, rien à faire de spécial. Dans les quartiers sud les jeunes vont se balader en bateau dans les calanques et plongent du bord aussitôt la belle saison arrivée. Dans les quartiers nord, le point de ralliement c'est plutôt la boutique d'alimentation du coin. On y boit un "zéro" en jouant à des jeux vidéos. Des jeux de foot bien sûr, Marseille contre Paris et devinez qui gagne ? On plonge dans la communauté comorienne, sa culture, son identité, sa cuisine. Les mères confient leurs difficultés de tous les jours à élever leurs enfants, les jeunes en ont marre des clichés. Mais on n'est pas chez les bisounours, certains minots ont cédé à l'argent vite gagné, aux trafics. Au pire ils en meurent, au mieux ils sont en prison pour plusieurs années. La concurrence entre trafiquants est rude, impitoyable. Ils feront quoi ces jeunes quand ils sortiront de leur cellule ? Tout pareil sans doute, ils ne savent rien faire d'autre. Les petites mains reprendront leur vie d'avant, le bas de l'échelle, guetteurs pour des "chefs", des narcotrafiquants qu'ils n'ont jamais vus et n'habiteront jamais à Marseille car leur vie confortable est ailleurs. Ils ont juste besoin de chair à canon et pas nécessaire de chercher bien loin pour en trouver. Les mères se révoltent et pleurent, mais leurs voix sont faibles même si elles sortent du silence et se font entendre, ce qui n'est pas si fréquent. Après avoir vu ces femmes pleurer, on est pris à la gorge et un besoin de plus de légèreté s'impose.

C'est parti pour l'incontournable Vélodrome, le foot, l'équipe, ses clubs de supporters historiques et par-dessus tout, son mélange culturel. Au stade, il n'y a plus qu'une seule voix, celle des passionnés de l'OM, ceux qui vont au stade depuis qu'ils ont trois ou quatre ans quelles que soient leurs origines ou leur religion. Leurs parents les y emmenaient quand ils étaient minotes et minots, ils feront pareil avec leurs propres enfants.

Mais on ne s'attarde pas plus que nécessaire. Nous voilà au très sélect Cercle des Nageurs qui tente de casser son image de ghetto pour riches en accueillant via des associations, des jeunes des quartiers doués pour les études, qui ne pensaient pas un jour y mettre un bout de leurs tongs à l'instar d'un Florent Manaudou ou d'un Camille Lacour.

Le rap des quartiers aussi a très bien franchi le périmètre, le son des jeunes rappeurs marseillais fait le tour de la France et s'écoute jusqu'aux USA.

Marseille est rebelle ? Elle l'a toujours été. C'est quasiment un pléonasme.

"Marseille, qu'on y soit né ou qu'on y débarque un jour, dans cette ville, on a vite des semelles de plomb. Les voyages, on les préfère dans le regard de l'autre." - J.C. Izzo - Chourmo

Je ne m'attendais pas à grand-chose, finalement une bonne surprise. A voir.

@PatouStVictor

13/6/2023